Alors ? Passionnant n'est-ce-pas ?
L’enfant de Leugny, description, diagnostic, étiologie, conduite à tenir.
1 - Identification de la malformation.
Le curé de Leugny est un fin sémiologiste. Nous ne sommes
pas encore au siècle des lumières, mais il observe.
Résumons :
Il s’agit d’un garçon (ligne 8)
il est né vivant (ligne
27)
respire et crie (ligne28), le curé compare sa voix à
celle d’un étourneau ( ?)( ligne 31)
-le corps est strictement normal (ligne 8)
- Les anomalies se situent au niveau de la tête et de la face :
Les yeux paraissent anormalement hauts (ligne
11) et exorbités, c’est le premier
élément qui retient l’attention du curé, associé à une anomalie majeure du crâne.
Il manque le front (ligne 12 et 13), le crâne est déformé (ligne 14), le cuir
chevelu est présent de manière symétrique derrière chaque oreille (ligne 15),
mais le reste de la tête présente une peau sans poil (ligne 20).
Au niveau du
cou est noté un bourgeon charnu (forme 23).
Le reste de la face semble normal, même si le curé s’interroge
sur des anomalies mineures : les oreilles semblent légèrement en pointe (ligne
18), la bouche est formée, et la langue semble elle aussi, un peu pointue (ligne 27).
2 – Etiologie de la malformation : La peur du loup !
Ancestrale, la peur, à l’origine des malformations, restera
longtemps et reste encore aujourd’hui à tort dans les esprits. A cinq mois de grossesse, la
femme de Pierre Bertheau a croisé un loup dévorant sa proie. Une grande frayeur
l’a prise à laquelle le curé attribue la malformation. Godin se trompe. L’anencéphalie
est une anomalie embryonnaire due à un défaut de fermeture du tube neural. Celle-ci survient au plus tard au 26ème jour de
gestation.
Le loup croisé longtemps après est innocent !
3- Conduite à tenir.
L’enfant Bertheau meurt sous les yeux du curé (ligne 43). La
matrone l’a baptisé et le curé approuve sa décision.
Dans les lignes qui suivent, Godin argumente
les éléments qui lui permettent de donner « âme » à cet enfant.
L’anomalie est survenue après la peur du loup. La date est fondamentale. Végétative, sensitive et raisonnable, Godin nous apprend ainsi, qu’il faut 40 jours
pour donner une âme à la vie d’un futur garçon
et le double de temps pour une fille…. (ligne
54).
Pas encore féministe, Godin.
Serviteur de Dieu mais néanmoins épris de science, on le connait par ailleurs passionné d'étoiles, érudit. L'acte qui décrit cette naissance, long, précis, argumenté, cherche mot après mot à éloigner l'animalité pour trouver l'humain,
« je le crois » (ligne56) insiste-t-il.
Le
loup est venu après les 40 jours, il a modifié les organes extérieurs mais cet
enfant est bien humain. On comprend alors aussi les précautions que le curé à
prises à décrire les anomalies mineures de la face (oreilles , langue). Se
pourrait-il qu’il lutte contre l’idée du
diable qui pourrait s’insinuer dans les esprits, dans les propos tenus autour
de lui ?
Rappelant en conclusion tous les éléments qui lui paraissent
essentiels, Godin l’humaniste, garde l’enfant de Leugny parmi ses paroissiens.
Protagonistes de cette naissance :
Pierre Bertheau le père, le nom de la mère n’est pas noté dans
l’acte, le décès d’une Renée Bertheau en 1703 laisse penser qu’il s’agit de
Maujuré Marie.
Mathieu Bertheau frère de Pierre et Magdeleine Babin sa femme
Jeanne Girond matrone, femme de Charles Farou.
C'est passionnant ...
RépondreSupprimerquelle patience pour déchiffrer mais quel résultat !
bravo !!!