jeudi 23 février 2012

Serment de Sage-Femmes. Bonnes 1786 - Archives Insolites de la Vienne



"L'an mil sept cent quatrevingt six et le sixième jour du 
moy d'Aout, à l'issu des vêpres, et en présence d'une affluence de peuple
Marie Charanton, veuve du Sieur Urbain Roy Chirurgien de ce bourg,
et Marie Espin femme du nommé Pitois Des Vigealières sur cette 
paroisse, munies toutes les deux de bons certificats et de leur lettres 
de maitrise en bonne et due forme, ont été reçue pour exercer
l'office de sages femmes et ont fait serment entre mes mains,
suivant la forme prescritte dans le rituel du Diocèse, en foy
de quoy j'ay signé le présent acte le jour et an que dessus"
Desmeurs Curé de Bonnes. 
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 C'est en 1760 que l'Etat prend enfin conscience d'un devoir en matière de naissance. Mortalité infantile, maternelle, séquelles désastreuses de manoeuvres obstétricales improvisées, enfants lourdement handicapés, la maternité est misérable. 

Le corollaire de cet élan de progrès sera la chasse aux matrones. 

Madame du Coudray sage-femme, débute sa mission à travers la France. 

Et singulièrement, c'est aux hommes qu'elle va confier la direction de l'enseignement  de l'accouchement. Au curé d'une part qui choisit les candidates, au médecin d'autre part qui relayant l'enseignement de la plus illustre des accoucheuses organise et poursuit l'apprentissage.
 En l'enseignant, le médecin fait de la sage-femme son auxiliaire. Il impose ses limites. 

Pour changer et diriger les pratiques, on cherche du sang neuf. Ce ne sont pas les matrones que l'on envoie à la ville suivre les cours. Le curé recrute de nouvelles paroissiennes, jeunes et de bonnes moeurs. La sage-femme est aussi l'auxiliaire du curé, elle sauve les corps mais aussi les âmes. 
Une fois diplomées, revenues au village, celles-ci bénéficient d'avantages fiscaux. On encourage leur pratique, on valorise leur statut. 
Mais l'essentiel reste à faire. 
Convaincre. 
Convaincre les paroissiennes de faire appel à ces nouvelles recrues. Et ça ne va pas tout seul. La matrone garde son pouvoir, son influence.  
Les modes d'exercice sont très différents , la matrone n'est pas rémunérée, alors que la sage-femme l'est. 
Les rivalités s'installent, les résistances persistent. 
On voit bien alors l'intérêt d'une petite fête pour éduquer les populations, promouvoir le savoir, valoriser la fonction, convaincre. C'est cette oeuvre éducative que le curé Desmeurs de Bonnes pratique en 1786 en faisant prêter serment à Marie Charanton et Marie Espin sous la liesse populaire ! 
Ces deux sage-femmes furent formées à Poitiers par le Dr Maury, obstétricien de l'époque qui poursuivra son oeuvre sous la Révolution.

 Les demandes de formation de sage-femmes se feront de plus en plus nombreuses, nous y reviendrons...


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