jeudi 19 février 2015

Potions anti-grippe - Lulu Sorcière Archive dans Centre Presse - 19/02/2015.

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1773, la santé n’a pas encore sa loi, mais elle a ses règles et la presse en fait écho ! Dans une ville du Poitou, chirurgiens et apothicaire s’égratignent en justice à propos de leurs compétences respectives ! Pensez braves gens ce dernier saigne ses clients dans son arrière-boutique ! S’il admet avoir un peu empiété sur les compétences de ses rivaux, le pharmacien sait se défendre et assure qu’il cessera les pratiques dont on l’accuse dès lors que l’on défendra aux premiers de faire commerce de remèdes ! Dès lors qu’il s’agit de puissant, la justice peine à froisser et renvoie, dans sa grande sagesse, l’apothicaire à ses flacons et les chirurgiens à leurs bistouris. Tels sont alors pris qui croyaient prendre ! Interdits de remèdes, les chirurgiens se voient amputés d’un profit considérable ! Ils répondent à cette « injustice » en s’accordant à ne délivrer désormais que de la poudre d’Alliaud, potion dont ils semblent avoir l’exclusive distribution. La poudre d’Alliaud, késako ? Purgatif à tout faire, elle n’est rien d’autre que l’antidote du médicament générique. La médecine de l’époque a son axiome : le riche guérit d’autant mieux qu’il est  soigné plus cher… Pour que tout aille mieux, au Jalap du pauvre, Alliaud le visionnaire, ajoute un peu de Nerprun, vendant à prix d’or à Marquise,  sa poudre de perlimpinpin ! L’histoire dira que l’homme de l’Art est mort riche et décrépi… en sirotant  son remède.
Mais revenons à nos paroisses ! Tandis que ces spécialistes de la ville toussent au tribunal, la grippe est au village. Et au village, le désert médical règne avant l’heure ! Heureusement le curé est parfois un peu sorcier et distribue en toute impunité ses potions personnelles, remèdes d’une efficacité garantie par les cieux,  qui donnent à ses registres des allures de grimoire. Voyez contre la forte fièvre : un gros de quinquina, un gros et demi d’iris de Florence, l’un et l’autre bien pulvérisés et bien délayés dans un grand verre d’eau de la fontaine qu’il faut avaler avant le moment de l’accès de fièvre. Que si la fièvre ne vient que deux heures après avoir pris le breuvage, il faut absolument manger et ne point se purger d’un ou deux jours après.  Si malgré tout vient la pleurésie, prenez une tête d’orties rouges, les couper menues, faites les bouillir dans un grand verre de vin rouge et autant d’huile d’olive… passez le tout… et faites prendre le bouillon au malade, le plus chaud qu’il pourra !
L’épidémie de grippe ayant traversé les siècles en se moquant parfois du vaccin, avec le bon curé de Cernay, décoctons allègrement et  sans tarder quinquina, lierre, iris et orties ! Le jardin nous  gardera des fièvres, de la pleurésie et même en prime de la rage ! Pour ces remèdes incontestables, on s’étonnera malgré  tout de l’utilisation de l’huile d’olive en Poitou, quand celle de noix a chez nous des vertus de guéritou incontestables !

Source : Archives Paroissiales et Presse Ancienne de la Vienne.